Potez 220

Publié le par Romain Lebourg

Le Potez 220, une vocation ratée

Hier, en feuilletant un ouvrage, je suis tombé sur une brève notice traitant du Potez 220. C'est un bon candidat pour les réflexions du genre "ah ! si on en avait eu..." Mais, au delà de ça, cet appareil mérite quand même que l'on parle un peu de lui.

Un appareil si prometteur !

Le Potez 220 est issu du bureau d'étude de la société ANF-les Mureaux. C'était un bimoteur censé répondre au programme T3 de 1936. Seulement voilà : ses performances ont été jugées trop importantes pour qu'il continue d'être étudié dans ce cadre là ! Bien que Potez proposait déjà un dérivé du Potez 63, le Potez 220 fut donc reclassé dans la catégorie A3.

Comme le Potez 637, le Potez 220 était un bimoteur à aile basse, de construction entièrement métallique. Son train d'atterrissage était escamotable. L'équipage prenait place sous une verrière et l'observateur bénéficiait d'une gondole ventrale pour observer le sol ; le poste de tir de l'opérateur radio était surélevé et placé sous une sorte de bulle. Ces deux bimoteurs partageaient également la même motorisation : des Gnome-Rhône 14 M 4/5 de 14 cylindres en double étoile développant 700 ch. L'armement prévu consistait en deux mitrailleuses fixe dans le nez, une mobile pour la défense arrière maniée par l'opérateur radio et une dans la cuve de l'observateur, tirant vers l'arrière également (comme sur le P. 637, elle n'aurait peut-être pas été montée). Comme pour son homologue, Potez dut revoir sa copie lorsque de le STAé décida de supprimer la gondole ventrale pour placer l'observateur dans un nez vitré : cela donna le Potez 221.

Les deux prototypes du Potez 220 furent achevés en avril et octobre 1939. Leurs performances se montrèrent supérieures à celles des Potez 637 et 63-11, avec une vitesse maximale variant, selon les sources, de 450 à 465 km/h ! Seulement, au moment des essais, les Potez 63 était déjà en production et en cours de livraison. Qui plus est, le Bloch MB-174 n'était pas loin d'entrer en service également. Le développement ne fut donc pas poursuivi. Le Potez 220 était arrivé trop tard !

Une vue de ce qu'a pu être le Potez 220 n°01, réalisée d'après un plan 3 vues et photos

Une vue de ce qu'a pu être le Potez 220 n°01, réalisée d'après un plan 3 vues et photos

Fallait-il écouter ses promesses ?

Les premiers combats aériens des mois de septembre et octobre 1939 ont mis en évidence la vitesse insuffisante des Potez 63 pour échapper au Messerschmitt Bf 109. Pourquoi ne pas avoir remplacer le Potez 63 par le Potez 220 (ou plutôt le Potez 221) sur les chaînes de fabrication ?

Les raison sont multiples :

  • le besoin d'un avion de reconnaissance moderne et rapide était criant. Or le Potez 63-11 avait le mérite d'être disponible immédiatement, alors qu'il se serait encore écoulé quelques mois avant la sortie des premiers Potez 221 ;
  • le Potez 63 partageait beaucoup d'éléments avec le Potez 631, de sorte que la production à l'échelle industrielle était rodée et avait nécessité peu de modification des chaînes (seules les parties avant du fuselage différaient). L'introduction du Potez 220 aurait certainement obligé à revoir ce schéma de production ;
  • un dérivé du potez 63-11 avait été choisi pour le programme T3, il n'y avait donc encore moins d'intérêt à rompre la méthode de production mise en place ;
  • Le Potez 63 était certes moins rapide, mais il était relativement maniable. Je ne suis pas certain que le Potez 221 aurait eut les mêmes qualités manœuvrières ;
  • le Bloch 174 était sur le point d'entrer en service. Hors les performances de cet appareil étaient meilleures que celle du Potez 220. À terme, il aurait supplanter les Potez 63 dans les groupes de reconnaissance. Dans les groupes aériens d'observation, les performances du Potez 63-11 aurait certainement été jugées suffisantes, compte-tenu de la moindre profondeur de leur zone d'action.

Il est donc évident qu'à l'automne 1939, il n'y avait tout simplement pas de place dans l'arsenal aérien français pour le Potez 221. Cet appareil, aurait sans doute pu faire meilleure figure face aux chasseurs allemands. Mais le mettre en production aurait retardé la rénovation des unités de l'aviation de renseignement. Au final, c’eût été un mal pour un faible bien.

Sources :

  • Brefort D, Jouineau A, L'aviation française de 1939 à 1942 : chasse, bombardement, reconnaissance et observation tome 2, coll; Avions et pilotes n°8, éd Histoire & Collections 2005
  • Marchand A, Le grand gaspillage des T-3 première partie, Le fana de l'aviation n°353 avril 1999
  • Moulin J, Le Bloch 174 et ses dérivés, coll. Profils Avions n°10, éd Lela Presse 2006

Publié dans Ah ! si..., Les machines

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