Potez bashing 2

Publié le par Romain Lebourg

Le Potez 63, cette grosse daube !

II - Le retour

Il y a quelques mois, je commettais un article pour "réhabiliter" le Potez 63, appareil qui me parait assez injustement décrié. Lisant les rapports rédigés après la campagne de 1939-40, je pense qu'il y a de la matière à exploiter pour expliquer nos pertes.

L'avis des utilisateurs :

D'abord il transparaît clairement que l'appareil n'était pas la panacée. Ainsi, concernant le GR II/52, on peut lire que, ce matériel, malgré les progrès remarquables qu'il réalisait sur le précédent [Potez 542, NdlA], était encore insuffisant pour les reconnaissances d'armée ; pas assez rapide, insuffisamment défendu, il ne possédait aucun blindage. Il est également critiqué la solution de la gondole ventrale, indiquant que l'observateur ne voyait absolument rien dans son habitacle. Il concède ensuite que de sérieux progrès furent faits avec le Potez 63-11 véritable avion d'observation, qui fut ensuite mieux armé.

Au GR I/14, on a commencé la guerre sur Bloch MB-131. Les premiers Potez 63-11 ne sont réellement entrés en service qu'en octobre 1939. Entre temps et le temps que la dotation soit suffisante, des Potez 637 et leurs équipages furent détachés par le GR II/52 puis le GR II/33. Le commandant Henri Lamey note que le Potez 63 a été un progrès très net sous tous les rapports. Seul bémol : à la fin de la campagne, il était devenu très insuffisant. Les deux griefs formulés sont qu'il n'était plus assez rapide par rapport aux avions de chasse ennemis et que l'armement défensif était insuffisant : le jumelage [de mitrailleuses, NdlA] s'impose, précise l'officier.

Ces deux avis sont donc pleinement concordant et pointent les mêmes défauts. Défauts qui ont déjà été évoqués et sont communs autres autres appareils de sa catégorie.

Potez 63-11
Le Potez 63-11 n°494 sous le feu de la Flak, en juin 1940

L'avion ne fait pas tout

Toutefois, on aurait tord de penser que les qualités ou les défauts de l'appareil font tout. L'équipage qui le met en œuvre est également important.

Or le rapport de fin de campagne du GR II/52 est assez intéressant à ce sujet. D'abord, son auteur indique qu'un très petit nombre d'équipages [étaient] confirmés sur Potez 63. Mais il va plus loin. En effet, les premières pertes du conflit, ne sont pas à rechercher dans les performances de l'appareil mais dans celles des pilotes :

"Mais le personnel n'avait pas été transformé soigneusement sur ce matériel [le Potez 637, NdlA] ; habitués à voler sur Potez 542, nos pilotes n'ont pas tiré, au moment du danger, toutes les ressources du matériel récent ; c'est ainsi que l'on vit disparaître, au début de la Guerre, des équipages d'élites, qui n'avaient pas eu le temps de s'adapter au matériel moderne."

En effet, le Potez 63 avait quelques qualités manœuvrières. Edmond Petit, alors lieutenant au GAO 1/520, confesse avoir mené la vie dure aux chasseurs lors de son stage de formation sur Potez 63. De même, le 14 octobre, un Potez 63 du GR I/14 parvint à esquiver l'attaque de 4 Bf 109, puis à leur échapper en piquant ; peut-être aurait-il même pu endommager un de ses agresseurs si sa mitrailleuse avant n'avait pas été bloquée par le gel ! Ainsi il ne faut pas juger l'appareil à l'aune de ses simples performances ou d'une liste de pertes. Le contexte est également très important.

L'avis du Cdt Georges Lévesque, commandant des FACA 8 nous éclaire assez sur le sujet : le Potez 63 pouvait résister quelques minutes à une patrouille de chasse (le Cdt [Jean] Leclere* a lutté 17 minutes avant de succomber, mais c'était un ancien chasseur), s'il n'était pas secouru à temps il était descendu dans la grande majorité des cas. Ainsi, les pertes en Potez 63, ne sont pas dues qu'à l'appareil mais aussi à ces conditions d'utilisation.

Note :

* Le commandant Jean Leclère commandait le GAO 512. Il fut abattu par quatre chasseurs de l'escadrille 5./JG 51. Avec lui périrent le lieutenant Jacques Nodet, du 20e Dragons, et le sergent Christian Licitri.

Sources :

  • Petit E, Drôle de Guerre en Mureaux 115, in Icare n°53, printemps-été 1970
  • Renseignements à tirer de la guerre des GR I/14 et II/52 et des Forces Aériennes du 8e Corps d'Armée
  • Rapport de combat Lieutenant Gérard Sermet, du 14 octobre 1939

Publié dans Les machines

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